Musique ••• Je ne comprends pas exactement ce qu’il se passe sur cette île. Et après une semaine d’errance je dois dire que je ne comprends toujours pas. Je n’ai jamais été crédule et lorsque j'entendais des histoires, les monstres avaient toujours un fond humain et je ne croyais pas réellement à la magie et aux créatures surnaturelles. Hors, ici, plus rien n'a de sens. Et lorsqu’il en prend un, mes certitudes s’effondrent. Et si c’est fascinant, de prime abord j’aimerai tout de même comprendre ce qui essaie de faire de moi son dîner.

Après seize années passées à l’ombre du monde, je me rends bien compte qu’il a continué de tourner sans moi. Les geôliers n’ont certainement pas pris la peine de m'informer que les histoires qui ont tant fasciné l’être humain étaient finalement vraies. Et que si on me relâchait ici c’est dans l'espoir que je sois à mon tour dévoré. Je ne sais pas qui a décidé de cela, mais cela ne m'étonne pas.

Ah. L'hypocrisie humaine. C’est à croire que nous sommes plus gangrénés par la monstruosité que je ne le pensais. Pas étonnant que les monstres aient décidé de s'exposer.

J’arrête un taxi, qui baisse sa fenêtre. Je ne suis pas certain que tu aies véritablement compris mes intentions. À la façon dont tu me regardes j’ai l’impression d’être l’une de ces traînées légendaires qui bordent le bois de Boulogne. Bien que le chaland doit se faire rare à présent. Je me penche en avant, la bras appuyé contre le haut de la vitre :

– Si tu m'ouvres la portière, je te donnerai le monde, trésor.

Je susurre, sur un ton que je veux charmeur et suggestif. Ou c’est la flatterie que je distingue dans tes yeux. Je me redresse, en entendant des hurlements derrière moi. Oh. J'oubliais que j’étais presque sur le point de mourir.

Je contourne le taxi, passe devant les phares et je m’installe à côté de toi.